Un kiwi qui se renouvelle

Installé depuis 2003 à Sorde-l’Abbaye dans les Landes, Thomas Noguiez a repris et développé la culture du kiwi lancée par son père dans les années soixante-dix. Les plantations irriguées — 5 ha de kiwi jaune (variété Sungold de Zespri) et 8 ha de kiwi vert (variété Hayward) — sont en bordure de deux larges rivières (Gave de Pau, Gave d’Oloron), en zone d’appellation Kiwi de l’Adour (IGP et label rouge). Actinidia est une liane vigoureuse qui demande des travaux de taille et palissage de décembre à mars, d’éclaircissage des bourgeons floraux en avril, puis sur fruits en juin, de taille en vert l’été avec une récolte de la fin de septembre à la mi-novembre. Au total, 600 h/ha en moyenne pour le kiwi vert, jusqu’à 1 000 h/ha pour le kiwi jaune.

Se protéger des aléas climatiques

Dans le Sud-Ouest, les feuilles pointent à la mi-mars, les boutons floraux à partir d’avril pour une floraison en mai : « De la fin de mars au début de mai, la période est tendue à cause du risque de gel », explique Thomas Noguiez. Ses vergers sont équipés de sprinklers pour asperger la végétation en cas d’alerte météo (bourgeons et boutons protégés dans la glace). Depuis 2010, le kiwiculteur généralise l’installation de filets paragrêles et de brise-vent latéraux. Cela permet une meilleure croissance végétative, réduit les casses de bois —donc le risque de contamination par la bactérie PSA — et freine l’entrée des punaises diaboliques. « Ces mesures prophylactiques sont particulièrement recommandées pour les vergers de kiwis jaunes, plus sensibles à ces deux pathogènes », complète Franck Gilbert, responsable du développement des vergers pour Sikig/Garlanpy.

En mai, les producteurs renforcent la fécondation des fleurs, peu attractives pour les pollinisateurs sauvages : « Je loue des ruches d’abeilles domestiques, 8 ruches par hectare pour une dizaine de jours. » Mais leur travail peut être perturbé par les filets : « Quand il y a des filets, il vaut mieux introduire des bourdons, à raison de 4 ruches par hectare », complète Franck Gilbert. À noter que cette année, le producteur a fait des essais de pollinisation assistée (pulvérisation de pollen acheté) sur 30 ares de kiwis jaunes.

Subtile irrigation

Les plants de kiwi ont besoin d’eau, sans excès : « Dans mon sol limoneux, de mai à octobre, il faut maintenir 28 % d’humidité à 40 cm de profondeur. Je pilote l’irrigation à l’aide de sondes capacitives, reliées à mes stations météorologiques. Je fractionne par cycle de deux heures, par microjets suspendus sous la végétation. Sous notre climat océanique, l’irrigation n’est généralement pas nécessaire avant la mi-juillet mais peut s’étaler jusqu’en octobre. » Les besoins en irrigation estivale sur ce bassin de production sont d’environ 1 500 m³/ha.

L’irrigation reste un poste clé mais d’autant plus raisonné que, depuis six ans, des mortalités surviennent dans les vergers de plusieurs zones de production, jusqu’en Italie. Les études concluent à une asphyxie racinaire par l’engorgement du sol en eau (récurrences de crues, d’inondations, de fortes précipitations) aggravé par des facteurs de compaction. Thomas Noguiez en fait les frais : « J’ai jusqu’à 30 % de mortalité dans certaines parcelles, quel que soit l’âge de la plantation, ce qui m’oblige à réfléchir à un renouvellement bien plus fréquent du verger. Alors que cette liane est capable de produire abondamment pendant bien plus de trente ans ! »

« Aujourd’hui, on s’emploie à aérer et alléger les sols. On préconise l’usage d’un fissurateur sur l’interrang bien ressuyé. Je déconseille le travail superficiel sous la canopée pour ne pas endommager le chevelu racinaire, prévient Franck Gilbert, mais de multiplier les apports de compost grossier. » Le BIK (Bureau interprofessionnel du kiwi) se penche aussi sur la recherche de porte-greffes plus adaptés aux sols lourds et humides.